lundi 24 décembre 2018

Le manufacturier de Mattias Köping - Editions Ring

**** Chronique de Jess ****

Le 19 novembre 1991, une poignée de paramilitaires serbes massacrent une famille à Erdut, un village de Croatie. Laissé pour mort, un garçonnet échappe aux griffes des tortionnaires, les Lions de Serbie. Un quart-de-siècle plus tard, l'avocate Irena Ilić tente de remonter la piste jusqu'à la tête du commando, le sinistre Dragoljub.

Le 1er avril 2017, les cadavres d'une femme et de son bébé sont retrouvés dans la banlieue du Havre, atrocement mutilés. Niché dans le dark Web, un inconnu sous pseudonyme revendique le double meurtre et propose les vidéos de ses crimes à la vente sur son site Internet... Depuis quand sévit-il ? Prêt à transgresser la loi, le capitaine de police Vladimir Radiche s'empare de l'affaire qui sème la panique sur le pays, au risque de voir l'inimaginable s'en échapper.

Les deux investigations vont se percuter avec une violence inouïe. L'avocate et le flic ont des intérêts divergents et sont prêts à se livrer une guerre sans merci. Emportés dans l'abîme du terrifiant conflit yougoslave, les enquêteurs évoluent dans un vertige noir, gangrené par la violence et la corruption, où les plus pourris ne sont peut-être pas ceux que l'on croit. Crimes contre l'humanité, meurtres en série, fanatismes religieux, trafics entre mafias sans scrupules, l'étau se resserre au fil des chapitres. Les égouts de l'Histoire finiront par déborder, et vomir des monstres trop vite oubliés.

N'ayez pas peur.

Oui, il y a tout cela dans Le Manufacturier. Non, il n'y a pas d'autre issue.




J'ai découvert Mattias Köping avec son premier thriller Les Démoniaques (mon avis ici) qui avait été une sacrée découverte et un énorme coup de cœur. J'attendais donc avec impatience son nouveau livre pour voir à quelle sauce il allait nous manger, nous pauvres lecteurs. 
Dans Les Démoniaques les ingrédients étaient drogue, esclavage sexuel, meurtres, corruption, pédophilie et toute la pourriture humaine que l'on peut rencontrer dans ces domaines. Ici Mattias reprend quelques ingrédients qui ont fonctionné et en a rajouté d'autres : mafia, prostitution, pédophilie, tortures et crimes de guerre.

Milovan a quitté son pays la Croatie à l'âge de 10 ans suite au massacre de sa famille. Laissé pour mort, à moitié égorgé, il a rejoint la France pour vivre chez un oncle éloigné de la famille, Boris. Ce dernier l'a adopté et en a fait son fils. Un jour, il voit dans une émission, une avocate serbe qui enquête sur les criminels de guerre des pays de l'Est. Elle fait tout pour mettre derrière les barreaux des miliciens qui ont massacré les populations. Malgré son dégoût et sa xénophobie envers les serbes Milovan va la contacter pour qu'elle retrouve le bourreau qui a exterminé sa famille.

D'un autre côté, une équipe des stups sous le contrôle du capitaine Latrigan et une équipe de la judiciaire sous les ordres du capitaine Radiche, dit Zéro, veulent démanteler un parrain de la drogue dans la cité de la Vallée Verte au Havre. Radiche est un flic borderline, détesté de tous ses collègues. Il n'hésite pas à enfreindre la loi pour mettre derrière les barreaux les pires saloperies. Et des saloperies il s'en passe : traites humaines, proxénétisme, deals de drogues, un vrai business !
Et entre les chapitres, nous rencontrons Vivardoux, un geek qui surf sur le darknet et qui est accro aux snuff movies et autres merdes dégueulasses que l'on trouve dans les fins fonds du web. Il va régulièrement sur le site du Manufacturier où il trouve son bonheur. Mais le Manufacturier a l'air d'avoir un but en tuant et mettant en ligne ses crimes. Lequel? Quel est le lien entre le Manufacturier et l'enquête au Havre? 

Dès les premières lignes je retrouve mes addictions au style de Mattias Köping. C'est bien un des rares auteurs qui avec un livre à son actif m'a rendu accro. Style percutant, en osmose avec l'histoire, c'est brut de décoffrage, c'est crade, ça fait flipper tellement ce qu'il nous raconte est vrai et sonne vrai. Je ne sais pas où il va chercher tout ça mais en tout cas ça fonctionne! 

Je n'étais pas du tout familière avec les différentes guerres qu'il y a eu dans les pays de l'Est. Cette partie de l'Histoire est vraiment passionnante mais en même temps horrible. Je connaissais la Seconde guerre mondiale côté Allemagne et France, mais pas du tout le rôle de la Croatie ni de la Serbie à cette période. Et dans les atrocités ils ont aussi fait très fort! 
Le travail de recherches sur ces différentes guerres est tout simplement remarquable. L'auteur s'est très bien documenté et nous retrace les différents conflits de manière claire et précise.
Quel est le point commun entre un baron de la drogue, un serial killer, et une enquête sur des crimes contre l'humanité en Croatie? Qu'est-ce qui lie tous les protagonistes? 

Des rebondissements où on ne s'y attend pas vont vous surprendre. Premier effet kiss-kool : une claque dans la tronche une première fois car là on se rend compte que l'auteur nous a bien entubé et baladé depuis le début. 
Et puis deuxième effet kiss-kool : la réalisation. Une des grosses interrogations vient de trouver sa réponse, on croit avoir deviné et on se dit mais non ce n'est pas possible ?!?!? 
Ne cherchez pas, je vous préviens vous ne pourrez jamais deviner le scénario de cette histoire à l'avance. Vous pourrez toujours tenter mais vous vous planterez. Jusqu'à la dernière page vous serez surpris et cerné par l'horreur à l'état brut. Vous passerez par un maelström d'émotions en lisant le Manufacturier, mais le plus souvent la colère et le dégoût l'emporteront. Mais chaque détail d'horreur à son importance dans l'histoire, rien n'est gratuit, tout à un but. 

Pas de longueurs, l'histoire passe d'une enquête à l'autre dans la fluidité parfaite d'un métronome. Enquêtes en tiroirs, multiples lieux (Le Havre, La causse de Mende, la Croatie..), pléthore de protagonistes nous sommes happés du début à la fin. Plus les différentes enquêtes avancent et plus le canevas des enquêtes parallèles se dessine et se précise. Ce bouquin est un putain de chef d'œuvre. Mais attention âmes sensibles s'abstenir car certaines scènes sont vraiment abominables. Mais c'est la touche de Mattias, l'horreur absolue, mais l'horreur qui existe ou qui a existé. Si on l'avait censuré, ce livre n'aurait pas eu le même impact je pense. Le pire de l'homme est décrit dans cette histoire. Je dirais même le pire DES hommes. 

C'est encore un énorme coup de cœur pour cette histoire que j'ai eu du mal à poser. Bon je me dis aussi que je dois avoir un problème pour avoir tant aimé une histoire aussi sordide ;-) ce doit être mon côté morbide.
Je peux dorénavant dire que Mattias Köping fait partie des grands et il me tarde maintenant de lire le suivant. D'ailleurs j'ai trouvé que la fin de ce livre était ouverte à une suite donc à voir! 
Par contre petit conseil, si vous n'aviez pas pu finir les Démoniaques car trop violent je vous déconseille de lire celui-ci car on passe à un niveau au-dessus dans le violent.

Némours 2019



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