**** Chronique de Jess ****
Jean-Michel est très heureux, en apparence : il a une femme brillante, un enfant éveillé, une belle carrière dans l’immobilier. Pourtant, ce bonheur est illusoire.
Les bleus sur sa joue pourraient être imputables à un mauvais coup au rugby. S’il n’ose pas en parler, c’est parce que la vérité est dérangeante. Un homme battu, c’est le déshonneur, mais battu par sa femme, c’est l’extrême soumission, la castration au ciseau à bois.
Jean-Mi endure les gifles et reste avec sa femme, jusqu’au jour où une rencontre improbable lui ouvre les yeux sur sa vie de couple.
Je remercie Nicolas pour m'avoir fait découvrir son dernier roman en avant-première. J'avais vu passer ses romans sur les réseaux sociaux mais je n'ai jamais pris la peine de découvrir ses écrits. Je découvre donc sa plume grâce à ce roman coup de poing (elle est facile celle-ci je n'ai pas pu m'en empêcher). Trêve de plaisanterie car ce roman traite d'un sujet dont on ne peut pas rire, au contraire. Nicolas Robin parle d'un sujet qui reste tabou à notre époque : les hommes battus par leur femme. Cela pourrait être une blague de mauvais goût, comment un homme peut-il se laisser maltraiter par une femme qui pèse moins lourd que lui ? Comment mais surtout pourquoi se laisse-t-il faire sans rien dire? Nicolas va nous raconter la descente aux enfers de Jean-Michel, dit Jean-Mi pour les intimes.
Jean-Mi, 35 ans, est agent immobilier sur la Défense, il a un très bon poste, gagne très bien sa vie et est en couple depuis quelques années avec Marylène. Ils ont un petit garçon, Antonin, dont il est fou d'amour. Marylène, elle, est chef marketing dans une grande maison d'édition. Tout va pour le mieux jusqu'à ce que Jean-Mi mette malencontreusement le pull en cashmere de Marylène à la machine à laver. ll a beau s'excuser et lui dire qu'il va lui racheter le même, Marylène est furieuse et le gifle. Jean-Michel est abasourdi, n'en revient pas du geste de sa femme. Mais cette dernière va rapidement s'excuser et mettre cette gifle sur le compte du surmenage lié à son travail.
Mais si Jean-Mi pense que c'est un égarement de la part de sa femme, il va vite déchanter quand une seconde gifle va lui être assénée et que la violence va s'accélérer. La honte va envahir Jean-Mi. A qui se confier sans qu'il passe pour une chiffe molle? Lui qui fait du rugby avec ses potes tous les jeudis, lui qui mesure plus d'1m80. C'est sûr ses potes vont bien se foutre de sa gueule.
Une rencontre, un matin, va l'aider à y voir plus clair. Sœur Solange fait la quête tous les lundis sur l'esplanade de la Défense. Il tombe par hasard sur elle et commence à discuter. Semaine après semaine, un lien va se créer entre eux. Lui qui ne croit pas en Dieu, il trouve la situation plutôt comique.
Nicolas Robin, va très bien décrire la descente aux enfers de Jean-Michel de la première claque à l'escalade de la violence. A croire qu'il l'a vécu lui-même tant c'est bluffant de réalisme. Il va surtout très bien décrire les sentiments de Jean-Mi face à cette situation qu'il pense unique. Comment réussir à parler ? Et à qui ? Car dès qu'il tente de dire que c'est sa femme qui l'a tapé, on commence à lui rire au nez ou lui demander ce qu'il a bien pu faire pour qu'elle le frappe. Car c'est forcément de sa faute si elle passe ses nerfs sur lui ! Jean-Mi est en fait dans un cercle vicieux. Il n'ose même pas aller au commissariat, il tente pourtant, mais devant les affiches de femmes battues il se rétracte. L'homme est coupable de frapper les femmes, alors pourquoi l'homme serait-il une victime ?
Ce roman est bouleversant, dur, poignant. L'auteur utilise quand même quelque pointe d'humour pour alléger notre sentiment de mal-être face à ce que vit Jean-Michel. Car on se sent mal pour lui, pour ce qu'il vit. On aimerait même qu'il se rebiffe, qu'il remette sa femme en place, mais Jean-Mi n'est pas ce genre d'homme, pour lui on ne frappe pas une femme, jamais ! Le personnage de Sœur Solange est parfait, je l'ai adoré cette bonne sœur 2.0 qui n'a rien à voir avec ce qu'on peut imaginer.
Il nous offre également quelques rebondissements qu'on ne voit pas venir et qui font qu'on comprend encore mieux pourquoi il n'ose pas parler de la violence de sa femme. J'ai trouvé la structure du roman très originale et bien trouvée, le fait que Jean-Michel raconte directement à sa femme le calvaire qu'elle lui a fait vivre, comme une confession sur le mal qu'elle lui a fait. Cela donne un côté intime à l'histoire.
Ce roman a été une claque, un livre que tout le monde devrait lire, surtout les hommes qui sont dans cette situation inextricable et qui trouveront j'espère le courage de partir et de dire ce qu'il se passe derrière les portes fermées de leur maison. A lire de toute urgence !
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